« Dans quel monde vivons-nous ? » : la garde des Sceaux, Christiane Taubira, a planché ce samedi au dîner annuel de la Grande loge de France (GLDF), une soirée empreinte de gravité après la découverte d’inscriptions hostiles à la franc-maçonnerie et à la ministre.
Près de 200 personnes, initiées ou profanes, avaient répondu à l’invitation de la GLDF, la deuxième obédience maçonnique française (33 000 membres) après le Grand Orient, dans le sous-sol voûté de son siège parisien. Parmi les convives de ce quatrième dîner annuel, organisé pour renforcer l’ouverture de la GLDF sur la société, figuraient l’ancien ministre Pierre Joxe, le chef de file des sénateurs écologistes Jean-Vincent Placé, le président du Conseil représentatif des institutions juives de France (Crif) Rogier Cukierman, ou encore le chef d’orchestre Jean-Claude Casadesus et le comédien Pascal Légitimus.
Discours très sombre
Le grand maître de la GLDF, Marc Henry (photo ci-dessus), les a accueillis par un discours très sombre, « inhabituel » pour ce genre de dîner a-t-il reconnu. Quelques heures plus tôt, des inscriptions « Non à la République maçonnique » et « Taubira dégage » avaient été découvertes sur la chaussée devant le siège de la GLDF, dans le XVIIe arrondissement. Marc Henry a précisé à l’AFP qu’il allait porter plainte après ces tags « odieux ».
« Toutes les communautés sont attaquées »
Pour lui, les « valeurs non négociables » que sont « la laïcité, les droits de l’Homme et la dignité humaine » sont mises à mal « comme elles ne l’ont jamais été depuis la Seconde Guerre mondiale ». « Toutes les communautés sont attaquées – les juifs, les musulmans, les francs-maçons... Cela n’est pas acceptable, cela n’est plus possible », a martelé le responsable lors du repas.
Taubira a planché sur la paix et l’État de droit
Invitée à plancher sur la paix et l’État de droit, Christiane Taubira a relevé que « l’actualité nous rappelle que l’homme peut être capable de tout et du pire ». « Dans quel monde vivons-nous ? Il n’est plus seulement intranquille, il grimace de bruits, de fureur et de feu », a-t-elle estimé. « Nous n’avons pas fait attention aux rages qui couvaient, aux barbaries qui s’apprêtaient à éclore », a encore dit la ministre de la Justice dans une intervention sans notes mais non sans références, convoquant Rousseau, Césaire, Jaurès ou Goethe.
« Je ne veux pas que Marine Le Pen passe »
Autre invité d’honneur, l’écrivain Alexandre Jardin a demandé aux convives de la GLDF de soutenir son collectif citoyen « Bleu, blanc, zèbre », qui fédère des initiatives locales dans tous les domaines (social, culture, etc.). « Je pense qu’on peut faire redémarrer ce pays fracturé par de l’action qui vient d’en bas », a souligné le romancier, faisant valoir que « le marché de la promesse a été carbonisé par 30 ans d’alternance ». « Je ne veux pas que Marine Le Pen passe, c’est maintenant que ça se joue », a-t-il encore lancé.